mercredi 27 janvier 2016

ARTISTES de FICTION. LGBT.

Einar/Lili.



Peu avant The Danish Girl, de Tom Hooper, le biopic consacré à la vie de Lili Elbe/  Einar  Wegener, peintre transsexuel "historique" et de sa femme Gerda, sont sortis: un Pasolini, Abel Ferrara, 2014,
Le scandale Paradjanov, Serge Avédikian, 2015, et
Que viva Eisenstein de Peter Greenaway.


Trois « vies » de  cinéastes dont l’oeuvre et les choix entrèrent en conflit avec l’autorité sur le plan politique. Leur homosexualité étant autant visée que le contenu filmique lui-même.

Biopics et petites comédies dramatiques.

Ces productions , si on ajoute deux films sur Yves Saint Laurent, s’inscrivent dans un climat socio-politique agité par les manifestations pour ou anti mariage pour tous, et la légalisation dans nombre de pays occidentaux. Cette normalisation des marginalités et un «coming out» généralisé  inspirent les scénaristes éventuellement sur le mode comique, si  l’on pense à «Guillaume ».

Les récits, s’attachent comme toujours autant, sinon plus, à la vie intime du personnage qu’aux recherches sur la création elle-même qui fit leur notoriété et reste heureusement dans l’histoire des arts. L’artiste dans tout scénario, qu’il soit personnage principal dans un biopic, ou personnage secondaire dans une fiction dramatique occupe encore une «fonction» de révélateur et une figure de la marginalité -plus ou moins- contestataire de la société. 
Les temps ayant changé, ouverture et tolérance, la figure de l’artiste « maudit » tend à disparaître, les artistes contemporains de chargent de leur promotion et les pratiques artistiques ne correspondent plus au programme d'insertion de la création dans la fiction.
Le jeune artiste devient rapidement "institutionnel", d'une part le copinage gay du milieu -qui ne permet pas vraiment la visibilité des femmes pourtant nombreuses- et d'autre part la mutation vers la vidéo et le numérique ne se prête guerre aux inserts d'atelier.
En revanche le film dans le film prend une place nouvelle, d'ou les fictions sur les réalisateurs.
Les films « documentaires » sérieux sur l’art avec l’artiste et archives en revanche se multiplient.

Stieglitz
Dans ces films « historiques », les réalisateurs actuels se tournent actuellement vers des figures de l’entre-deux guerres, après avoir épuisé le stock des artistes 1880-1920. En conséquence, la relation avec les grandes expositions tend à se perdre, faute de candidats compatibles avec la fiction; 


Un film de Bob Balaban, 2009, consacré à Georgia O’Keeffe et Stieglitz (dont on connait l'importance historique pour la diffusion de l'art en 1913) (Joan Allen/Jeremy Irons) n’est pas sorti en France alors qu’une importante retrospective a lieu à Grenoble. 

Georgia par Stieglitz

G. O'Keeffe



Souvent plus connue par les photos,
Cette artiste insuffisamment célèbre de ce côté de l’Atlantique, et pourtant éligible au palmarès des images  systématiquement interprétées comme « érotiques », bien que l'oeuvre soit plus complexe. 
Le film s'attache aux relations du couple, très peu à la création.







  Salma Hayek: Les "Deux Frida"

Autre femme artiste, Frida Kahlo, années 40 a déjà fait l’objet de deux productions. L'une mexicaine très hagiographique, la passionaria nationale,

 La Frida  de Julie Taymor, 2002, abordait la bisexualité de l'artiste, mais inventait ne mise en scène extrêmement créative.





Rose Sélavy, par Man Ray, 1920
Dans les années trente,



Les milieux artistiques et littéraires n’ont jamais occulté les relations homo ou bisexuelles qui liaient nombre de personnages publics, mais l’histoire retient (par chance) les oeuvres, y compris érotiques, sur papier ou sur toile, plutôt féminines. 
Marcel Duchamp en Rose Sélavy  jouait la provocation ironique du travestissement dès 1920. Aucun réalisateur ne s'est attaqué à ce "pape" , référence incontournable de l'art du XXè, quand la bibliographie est innombrable. Francis Picabia ferait un bon sujet.


Le sang d'un poète, séquence d'ouverture


La petite histoire restait dans la coulisse, le cinéma de l’époque contraint par la censure, transpose. Même les films de Cocteau sont cryptés. Jean Marais restera le preux chevalier de ces dames. 
La mythologie antique permet une forme d’allégorie de la figure du double.







Dans  Le sang d’un poète, 1930, la figure d’Orphée, incarne l’auteur, le sujet est repris dans les films suivants.
La traversée du miroir vise moins la descente aux enfers que la quête d’identité.  Dans les analyses du mythe, le héros n’est pas seulement envisagé sur le versant de la recherche d’Eurydice et du chant, mais sous les rapports homosexuels dans la Grèce antique.  On repère l’ange noir aux ailes de scorpion qui terrasse Orphée; La femme, statufiée, jouée par Lee Miller, artiste et modèle célèbre, est qualifiée "d’inhumaine" (sans (?) rapport avec le film L'inhumaine de Marcel L'Herbier de 1924, synthèse des créations de l'époque.

Cocteau au travail  sur le film, les cercles animés se réfèrent à Anémic Cinéma de M. Duchamp, 1926.

 Du désordre amoureux à l’homosexualité ordinaire

Partant d’une tradition soixante huitarde de l’art comme pratique d’un anarchisme plus ou moins politisé, et d’une liberté sexuelle, les jeunes artistes de fiction assurent leur place dans les films français: d’Olivier Assayas : Après Mai, 2012, restitue le parcours d’apprentissage d’une génération de contestataires -les dessins et peintures en cours valident leur contemporanéité, 1968 à Paris.  Nombre de films français de cette période ressortent actuellement (L'an 01Themroc, ou l'improbable Candy de CH. Marquand, par exemple). Moment de libération autant des moeurs que de la censure, les séquences érotiques quittent les salles X pour s’inscrire naturellement dans le récit dramatique. Sur ce sujet, le livre très « mauvais genre » de Jacques Thorens: Le Brady, cinéma des damnés, ed. verticales, 2015, mérite le détour.

Les années soixante-dix et quatre-vingt sont marquées par l’influence de philosophes comme Foucault et Deleuze, dont la pensée s’est largement diffusée, influence qui marque les milieux intellectuels d’où proviennent les jeunes cinéastes d’un cinéma dit «indépendant».
Verlaine (D.Thewlis) et Rimbaud (Léonardo).

Quand cinquante années de production de films « avec artistes » ont mis en scène des figures de personnages torturés,  névrosés, drogués et violents, l’émergence d’artistes gays -ce qui n’est pas incompatible- s’est construite sur des noms et des oeuvres mondialement reconnues et « bankables » pour les producteurs:
En forme d’inventaire (un reproche usuel) quelques réalisations intéressantes sur le plan filmique et artistique d’après 1970, généralement par des cinéastes concernés personnellement par la (re)connaissance de leur orientation sexuelle. Et toujours une lecture rétroactive. L’adaptation de Querelle, roman de Jean Genet de 1947,  n’est porté à l’écran qu’en 82 par Fassbinder.
Rimbaud Verlaine,  d’Agnieska Holland, 1995, rétro-histoire pour ébranler les manuels scolaires.

Warhol avec Basquiat, 1983.



Aux États-Unis, la figure emblématique d’Andy Warhol domine la scène artistique. Sa trilogie, du cinéma « underground » (réalisée par Paul Morrissey: Flesh, Trash, Heat, de 69 à 72), avec Joe d'Alessandro, suit une série de films expérimentaux.

 Victime en 68 d’une tentative de meurtre par la féministe Valérie Solanis, le film: I shot Andy Warhol, Mary Harron, 1996, s'empare de l'histoire.
Warhol apparait dans A Bigger splash., et dans Basquiat de Julian Schnabel, 2000, sous les traits de David Bowie, superbe performance d’acteur,  hommage…

David Bowie/ Warhol et Jeffrey Wright






Le Basquiat réalisé par Julian Schnabel, peintre avant d'être cinéaste particulièrement documenté sur le milieu prend les scènes d'atelier avec une reconstitution bluffante.







Le cinéma anglais  et l' histoire rétrospective de l’art.

Love, Alan Bates et Oliver Reed
Dans les années 70, tous les films de Ken Russell s’attachent à révéler la vie intime d’ artistes célèbres de l’histoire des arts, et requalifiés « sulfureux ».
Depuis Love, (dans le groupe, une femme sculpteur 1920), d’après un roman de DH Lawrence, où les sujets « ambigus »  s’exposent. Le seul contemporain étant Tommy.
S’ensuivra l’adaptation de toute la littérature anglaise, en particulier des jeunes gentlemen des collèges  Oxbridge.


David Hockney



Seul, le film de J Hazan « A Bigger splash »,1974, sans doute la première auto-fiction/documentaire de David Hockney quittant le swinging London pour les États-Unis, s’inscrit dans l’art contemporain.






Caravage et son amant.



Plus tard, le cinéaste anglais Derek Jarman dans Caravaggio, 1985, plonge le peintre entre les bas-fonds et les moeurs de l’église de Rome au dix-septième siècle. Superbes scènes nocturnes, la mort du Caravage , agressé sur la plage d’Ostie évoque en sous-texte celle de Pasolini.

Caravaggio, les modèles de la toile.











W.Standjak / Cellini



Le passionnant Cellini, L’or et le sang, co-prod It/GB de G.Battiato, 1990 , amours, péripéties dans la Rome des Papes et des turpitudes de l'église, excellent casting, et bonnes reconstituons historiques,
n’a plus rien voir avec : « The affairs of Benvenuto Cellini », La Cava, 1934. 
Pour cette période, Léonard et Michel-Ange sont encore restés intouchables.

Carrington et Lytton




Le scénariste Christopher Hampton, de Caravaggio et nombre de best historiques, réalisa un film sur Dora Carrington, 1994, peintre amie/amante tragique de l’essayiste gay Lytton Stratchey, du groupe de Bloomsbury  dans les années 20, lié a Virginia Woolf.





Francis et George

Puis John Maybury , assistant de Jarman réalise : Love is the devil, 1997, sur les rapports de Francis Bacon et de son amant George (mimétisme stupéfiant de l’acteur Derek Jacobi, et apparition non moins étonnante de Daniel Craig), met en scène l’élaboration des peintures et quelques documents d’époque.



Reconstitution  de la mise en scène d'une toile.
Actualités. G.L




À partir des années 2000, tout se montre, ou presque. Dans le domaine des arts plastiques, en France, installation et performance, il faut citer le film de Pierre Trividic et Patrick Mario Bernard: Dancing, 2003,
autofiction du couple « d’ours » avec galeriste , restée assez confidentielle.


La toile
Le modèle
Dans le cinéma américain, l’originalité de Love is strange, Ira Sachs, 2014, réside dans l’âge du vieux couple qui officialise sa liaison, coïncidence avec la généralisation des mariages homosexuels dans nombre de pays occidentaux. Vieux bobos intellos, George est musicien, renvoyé de son emploi en raison du mariage, Ben isolé se remet à la peinture. Une peinture très spécifique de la tendance figurative des années 2000, dont le tableau en cours est l’oeuvre du frère du réalisateur.

Du coté des filles, La vie d’ Adèle, A. Kechiche, 2013, a eu, outre son prix à Cannes, son lot de critiques scandalisées. Léa/ Emma est peintre, ses grandes toiles d’étreintes redoublent les séquences intimes. Une raison nécessaire sans doute pour justifier un mode d’existence jusque-là peu montré aussi crûment au cinéma. (Les Biches, Chabrol, 1967). (Je, tu, il, elle, Chantal Ackerman,19  ) 

Dans le récent Carol, Tod Haynes, 2015, une fugue amoureuse de deux femmes dans le contexte rigide des années 50, une habile peinture de la société upper class, utilise cependant le truchement de la photographie (hobby d’une petite employée, puis métier dans la presse) pour pointer ce que l’oeil de l’artiste offre comme ouverture à un monde différent, la photo est toujours un révélateur dans le récit. 

Transgenre enfin

Le travestissement, fut longtemps un ressort du film comique, « Nul n’est parfait », puis dans des bios d’artistes souvent musiciens; Les transsexuels restent plus nombreux dans le show biz,  Hedvig and the angry inch, J Cameron Mitchell, 2001, que dans les arts plastiques. Quoique la plasticité soit précisément le propre du genre qui se « normalise » dans le quotidien, ainsi dans Laurence Anyways (Dolan, 2012), ou Une nouvelle amie, (Ozon 2014). 

Almodovar, dès 86 avec La loi du désir et Tout sur ma mère, 99, met en scène quelques personnages; c’est dans La piel que habito , 2011, que le processus de transformation est décrit anatomiquement.  Pour les références artistiques contemporaines des images, la victime  se reconstruit par une activité de création thérapeutique , voir article dans mes archives 2011.



Pour rester dans les fictions peinture, The Danish Girl, T. Hooper, 2015, remonte aux origines des expériences de changement de sexe, en 1931. voir article précédent.

Le rôle de l’art n’est souvent qu’un petit aspect du drame psychologique, mais intéresse le champ du politique et de la politique des sexes, avec  les gender studies.  Quant à la libéralisation dans les autres pays, il faudra attendre une nouvelle révolution. Les cas Eisenstein ou Paradjanov  en sont la preuve. (à suivre…)


dimanche 24 janvier 2016

THE DANISH GIRL; arts décos.

Scène d'atelier, tournage.
Le film de Tom Hooper , co-production GB/US, narre le premier cas de transformation sexuelle d’un homme, le peintre danois Einar Wegener en Lili Elbe, avec la complicité amoureuse de son épouse Gerda, peintre plus connue. Une exposition concomitante au film actuellement au Danemark.
Une histoire « vraie » comme dans tout biopic; le scénario est issu d’ un roman, lui même adapté du Journal de Lili Elbe, qu’il rédigea pendant les mois qui précédèrent l’opération (une première mondiale en 1931) et son échec.

Si les protagonistes sont à peu près inconnus dans une histoire de l’art, le film s’est construit sur le casting, et le sujet: 
Les questions d’identité sexuelle, assez tolérées dans les milieux artistiques, entre deux guerres,  un certain libéralisme régnant dans un pays non catholique, ne sont abordées que plus récemment. La pertinence du transsexualisme coïncide avec l’actualité des débats politiques et de société dans les dernières années. Le sujet est devenu public, cet exemple tombe donc à point.

Tom Hooper, spécialiste des films historiques, en costumes et à grand spectacle, après Le discours d’un roi, Les misérables (très très fâcheux) a déployé les décors austères de Copenhague puis les fastes des Hôtels Parisiens et des lieux mondains autour de son quatuor de personnages principaux.
Einar, Eddie Redmayne, super oscarisé, son épouse Gerda, Alicia Vikander, nouvelle star suédoise, Ben Whishaw  et -surprise- Matthias Schoenaerts, en galeriste très urbain.
Belles performances d’acteurs dans un beau décor, des superbes costumes et quelques perruques.


Einar paysagiste

Comme dans tout biopic d’artistes peintres, les séquences alternent les scènes d’atelier , dans ce cas le couple partage le même espace, des pratiques différentes, lui, le paysage et elle le portrait;
comme souvent l’artiste ou son double exécute avec virtuosité, ici le tableau est souvent vu de dos et en quasi transparence de la toile.
-des scènes de galeries et de vernissage; les rapports plus ou moins difficiles avec les galeristes, Gerda est priée de changer de sujets. Les circonstances lui apportent le succès.

Lili face à Lili par Gerda





de son côté, Einar/Lili , à la recherche de son image, et de son identité, cesse de peindre.











L'intérêt de cette relation triple à la peinture se rapporte à une tradition du double portrait et de l'autoportrait, image spéculaire. Or, c'est le miroir offert par l'image réalisée par le tiers, Gerda, qui provoque la prise de conscience du devenir Lili.
Nombre de scènes du film mettent en évidence, cette démultiplication des portraits qui n'exclut pas la projection qu'opère Gerda sur Lili. Le couple y reste uni.


Scène d'atelier

Hammershoi.




Le Danemark, plat pays du nord de l’Europe est connu pour des peintures de paysages mornes et bleutés, le marais d’Einar est conforme, mais répétitif, c’est le lieu du choc émotionnel d’origine, les vues du port de pêche, animés comme dans La jeune fille à la perle, les envolées de ciels nuageux s’opposent à l’image récurrente du voilier immobilisé sur cale au bout du porche : un décor symbolique.


Hammershoi : Vue d'intérieur.
















L’intérieur de l’appartement s’inspire des oeuvres du peintre danois Vilhelm Hammershoi, (1864-1916) le plus connu, murs gris et perspective de pièces sans rideaux. Dans les scènes d’intimité, ces fenêtres désignent la liberté de la relation du couple. 
Le séjour parisien dans l’euphorie et l’ambiance mondaine, plutôt fin de siècle, offre quelques vues d’architectures modernistes. 


Une première partie du film, la lente prise de conscience de la nature du héros entre dans les standard du genre, le deuxième beaucoup plus fastidieuse est consacrée au parcours médical, entre diagnostic psychiatrique, internement et déni, les psychanalystes, Freud le premier, versant l’homosexualité du côté d’une déviance. Le changement de sexe n’était pas concevable, sauf à trouver un praticien éclairé.

S’il était nécessaire, le récit est plombé par la partition d’A.Desplat, particulièrement lourde et peu inspirée par les musiques contemporaines d’une période pourtant particulièrement créatrice.

Le film s’inscrit dans une tradition assez conventionnelle, déjà critiquée pour Le Discours d’un Roi,  l’esthétisation systématique ne ménage aucune des innovations que le sujet aurait pu provoquer. Dommage.



Scène du film
Transposition  et  anachronisme.

Paysage par Einar Wegener, le vrai.

L’éternelle jeunesse des héros, (contrainte du casting), dans un récit qui se condense sur une période ramassée des dernières années de vie de Lili, ne manque pas de surprendre. 
Einar/Lili aux airs d’adolescent, Gerda, pimpante et très bronzée/maquillée traversent le temps, inchangés, (allégorie de leur amour ?) 


or les biographies révèlent que  


Einar Wegener était né en 1882, Gerda née en 86 (morte en 40), étudiants aux Beaux Arts, ils se sont mariés en 1904. Gerda s’était installée à Paris en 1912 avant de revenir à Copenhague.

Entre 1928 et 30, ils auraient eu plus de quarante ans…le lifting n’existait pas alors. 


Lili, par Gerda, 1930

Lili Elbe, photo d'époque.




























Gerda, 1918




Connue comme illustratrice, les oeuvres des années 15 à 20 correspondent aux années folles, et sont souvent très libertines. Voir les catalogues.


Gerda: Vignette d'un album érotique.





















La ballerine, 1927, original.





Le réalisateur, (casting et contrainte financière de production), contextualise la période du récit  par les nombreuses productions picturales plus tardives de Gerda des années 25-30 ou du moins leur imitation, les droits de reproduction sont sans doute limités. Pour "La ballerine", on peut confronter l'original et la copie. 










Des oeuvres datées.

Lili par Gerda Wegener, 1928
Il faut au passage saluer les artistes qui se sont chargés de la réalisation des oeuvres dans la conformité de style avec le courant du Réalisme qui s’est imposé en Europe après 1925. 

Dans le film, étude en cours par une main anonyme.



Une figuration à la fois monumentale et léchée, mais sans critique sociale de la Neue Sachlichkeit. Dans le «Retour à l’ordre », Dada est loin, le surréalisme n’est pas évoqué.
La clientèle mondaine attend une idéalisation, le grand public du cinéma sentimental aussi.  





Karl Hubbuch: Les deux soeurs, 1929



Gerda, « femme à la cigarette », un sujet moderne,  croque Lili dans d’excellents dessins au trait, on pourrait penser à l’allemand  Karl Hubbuch.

Christian Schad,  Les Deux amies, 1928.















Gerda et Lili, 1925




Des portraits à la manière de Christian Schad. Deux artistes qui osaient les sujets homo-érotiques,  comme a pu en réaliser Gerda.  Très édulcorés dans le film. 
L'évolution stylistique de la peinture de Gerda est particulièrement intéressante: de l'Art nouveau ou Réalisme vers 1930, les sujets féminins sont majoritaires.
La thématique du double fusionnel, Lili/Gerda, comme parallèles aux scènes lesbiennes, une question à poser.
Nombre de femmes artistes, peintres ou photographes ont pratiqué l'autoportrait, se prêtant aussi comme modèles à leurs amis. Mais il faut pointer la persistance d'un imaginaire érotique fixé sur l'image de la femme, même si les auteurs masculins ont d'autres intérêts.
Le film aura surtout permis de découvrir une femme artiste méconnue.



Ci-dessous, Gerda, Einar au chevalet,  au bouquet, son double Lili nu(e), (trois fois Lili), une amie à l'accordéon, dans un style très "Art Déco".
Gerda Wegener, : A summer day, 1927